L’indicateur CCO (Cover - Characteristic species - Opportunistic species) est l’indicateur réglementaire mobilisé au titre de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE, 2000/60/CE) pour évaluer l’élément de qualité biologique « Macroalgues intertidales » sur la façade Atlantique, Manche, Mer du Nord pour les Masses d'Eaux Côtières (MEC) présentant des sites considérés comme bien végétalisés. Cet indicateur n’a pas été utilisé dans le cadre de l'Évaluation du “Bon État Écologique” DCSMM Cycle 3, mais son utilisation pour les exercices d'Évaluation suivants est une option envisagée.
La méthode CCO a été développée par une équipe française (Ar Gall et al. 2016, Laboratoire LEMAR, Institut Universitaire Européen de la Mer), pour tout type d’estran rocheux en mode abrité et semi-battu comptant entre deux et six ceintures de macroalgues. L’indicateur est basé d’une part sur la surface de couvert végétal sur roche, à chaque niveau, en fonction de l’importance surfacique de chaque ceinture. D’autre part, il tient compte, dans chaque ceinture, de la répartition des groupes fonctionnels de macroalgues suivant deux listes fermées d’espèces : celles dites “caractéristiques”, et celles dites “opportunistes”.
L’habitat marin susceptible d’être évalué par l’indicateur est, selon la Typologie NatHab Atlantique (v3, Michez et al., 2019 ; description de l’habitat dans La Rivière et al., 2022), le suivant :
- A1-2 - Roches ou blocs médiolittoraux à dominance algale
L’indicateur peut également contribuer à l'évaluation des écosystèmes marins listés au Règlement relatif à la restauration de la nature (Annexe 2) pour le type d’habitat (EUNIS 2022) suivant :
- MA1 23 - Communautés d'algues sur roche du médiolittoral ou de la frange infralittorale en milieu marin en Atlantique
Acquisition des données - suivi des ceintures de macroalgues des estrans marins
Il est cependant recommandé par la coordination nationale DCE de déployer ce protocole une fois tous les trois ans à deux saisons, au printemps et à l’automne (Ar Gall & Le Duff 2020).
Moyens matériels : 1 grand quadrat 1,65 × 1,65 m, 3 petits quadrats de 33 cm × 33 cm, carnet de notation.
Les mesures sont effectuées au sein des six ceintures (dans le cas de la Bretagne) :
1. Ceinture à Pelvetia canaliculata (Pc)
2. Ceinture à Fucus spiralis (Fspi)
3. Ceinture à Ascophyllum nodosum/Fucus vesiculosus (An/Fves)
4. Ceinture à Fucus serratus/Rhodophyta (Fser)
5. Ceinture à Himanthalia elongata/Bifurcaria bifurcata/Rhodophyta (He/Bb)
6. Ceinture à Laminaria digitata/Laminariales (Ld)
[Une adaptation des ceintures suivant le secteur biogéographique est réalisée (cf. Côte Basque : de Casamajor et al., 2022).]
Les couvertures de macroalgues sont mesurées au niveau de trois points fixes de 1,65 m × 1,65 m par ceinture. Au sein de ces points fixes, trois quadrats aléatoires de 33 cm x 33 cm sont disposés. Au total, 9 quadrats et 0,9 m2 sont suivis pour chacune des ceintures.
- Couverture des macroalgues :
Le protocole est comparable à celui développé pour les ceintures de macroalgues intertidales des MET (protocole indicateur ABER). La couverture végétale globale (toutes algues confondues) est déterminée dans chaque ceinture (en % de recouvrement).
- Nombre d'espèces caractéristiques :
Les espèces caractéristiques de chacune des 6 ceintures sont listées dans Ar Gall et al. (2016) (Tableau 1) et seules celles représentant une couverture moyenne supérieure à 2,5 % sont prises en compte. Au sein de chaque ceinture, le nombre d’espèces caractéristique est mesuré dans chaque quadrat.
Tableau 1 : Exemple de liste des espèces caractéristiques de macrophytes pour les côtes “Poitou-Charentes” (Bazin et al., 2022 d'après Ar Gall et al., 2016)
- Couverture des espèces opportunistes :
La couverture globale des espèces opportunistes est mesurée dans chaque ceinture au sein des quadrats.
Dans les 9 quadrats par ceinture, les espèces opportunistes sont les suivantes :
- Phaeophyceae : Ectocarpales (Ectocarpaceae : Ectocarpus spp., Pylaiella spp., Hincksia spp.).
- Chlorophyta : Enteromorpha/Ulva compressa, Enteromorpha ramulosa (Ulva clathrata), Ulva spp.
- Rhodophyta: Ceramium spp., Polysiphonia spp. (hormis P. lanosa et P. elongata), Boergeseniella spp.
- Microalgues coloniales (biofilm) : Diatomées (épiphytes ou épilithes)
Les listes des espèces caractéristiques et opportunistes sont adaptées suivant le secteur biogéographique (cf. Côte Basque : de Casamajor et al., 2022).
Couverture des macroalgues (métrique C)
Les différentes ceintures sont classées suivant l'importance de leur surface végétalisée sur la station. La ceinture à la couverture algale la plus dense présente le rang 1 tandis que celle ayant la plus faible couverture algale est classée au rang 6. La couverture de chaque ceinture est convertie en points. Pour attribuer les points aux couvertures des ceintures, cinq tableaux indiciels différents sont utilisés en suivant le rang de la ceinture. Les points obtenus pour chaque ceinture sont cumulés pour donner une valeur globale pour l’estran. La note cumulée ne peut dépasser 40 points. Seules les ceintures présentes sont prises en compte. Si une ou deux ceintures sont absentes du site, on applique une règle de trois à partir de la somme obtenue avec les ceintures existantes, afin d’évaluer le sous-indice sur une échelle de 40 points.
Tableau 2 : Scores pour la couverture végétale globale en fonction de la surface et donc du rang de chaque ceinture (Bazin et al., 2022 d'après Ar Gall et al., 2016)
Nombre d'espèces caractéristiques (métrique N)
Le nombre d'espèces caractéristiques présentes dans chaque ceinture est converti en points. Pour attribuer les points au nombre d'espèces, le tableau indiciel suivant est utilisé.
Tableau 3 : Attribution du score par ceinture à partir du pourcentage d'espèces caractéristiques (Bazin et al., 2022 d'après Ar Gall et al., 2016)
Les scores obtenus sont additionnés par station afin d’obtenir la métrique totale ayant une valeur maximale de 150. Par la suite, ce score est ramené sur une valeur maximale de 30 au moyen d’une règle de trois.
Couverture des espèces opportunistes (métrique O)
Le recouvrement moyen (%) des espèces opportunistes est calculé pour chaque ceinture d’algues (moyenne sur les 9 quadrats). Un score est ensuite attribué à chaque ceinture en fonction du taux de recouvrement moyen sur la base du tableau suivant (Tableau 4). Les ceintures à Pelvetia canaliculata (Pc) et à Fucus spiralis (Fspi) sont regroupées pour la mesure de ce paramètre.
Tableau 4 : Attribution du score pour le couvert des espèces opportunistes au niveau de chaque ceinture (Bazin et al., 2022 d'après Ar Gall et al., 2016)
Les scores pour chaque ceinture sont additionnés afin d'obtenir un score total par station ayant une valeur maximale de 30. Lorsqu'une ceinture est absente, le total se fait en appliquant une règle de trois pour rétablir un score sur 30
L’indicateur global CCO (Cover – Characteristic species – Opportunist species) est calculé en sommant les 3 métriques (C, N O) obtenues respectivement pour les métriques « couverture végétale globale » (note sur 40) « nombre d’espèces caractéristiques » (note sur 30) et « couverture d’espèces opportunistes » (note sur 30). Sa valeur maximale est 100.
[La grille de lecture a été calibrée et est utilisée dans le cadre de l’évaluation réglementaire DCE.]
L’état qualitatif d’un site « macroalgues intertidales » est obtenu en comparant l’indice CCO avec les seuils EQR (Ecological Quality Ratio) (Tableau 5). Pour permettre cette comparaison, la valeur de l’indicateur CCO (note sur 100) est divisée par 100 pour obtenir un ratio compris entre 0 et 1.
Tableau 5 : Grille de lecture pour l'indicateur CCO à partir de l'EQR (Ar Gall et al., 2016 ; MTES, 2018).
Un indicateur “DCSMM” composite a fait l’objet de développements (Ar Gall & Le Duff, 2020). Il est basé sur l'indicateur Ics, complété par une partie de l’indicateur CCO et de données de macrofaune associée.
L’indicateur CCO est potentiellement sensible à des évolutions dans le cadre du changement climatique, comme, par exemple, les proliférations de brouteurs.
Protocole de terrain facilement déployable avec peu de matériel. Nécessite une expertise taxonomique sur les macroalgues. Se basant sur une liste fermée d’espèces (caractéristiques et opportunistes), cette compétence d’identification peut être acquise avec une formation adaptée.
Les principales pressions anthropiques qui affectent l’indicateur sont les rejets d’eau chaude, la turbidité, l’eutrophisation, les pollutions chimiques - pesticides, marées noires-, la pêche à pied professionnelle ou récréative, l’exploitation industrielle (Tableau 6).
Tableau 6 : Sensibilité des métriques aux pressions (MTES, 2018)
Il est difficile de discriminer l’effet des différentes pressions anthropiques et l’effet des perturbations naturelles.
Une intégration de la macrofaune associée aux communautés macroalgales serait un bon complément.
La liste fermée des espèces caractéristiques et opportunistes a été adaptée pour les côtes charentaises et celles du Pays basque.
L’indicateur a été construit à partir d’un jeu de données limité (huit sites situés à l’écart de perturbations au sein de huit masses d’eau réparties en Bretagne et Normandie). La grille de classement est cependant validée dans le cadre de l’exercice européen d’intercalibration. L’application en France devra être assortie d’une évaluation des incertitudes liées à cet outil, afin de pondérer si besoin le classement brut indiqué par cette méthode.
L’indicateur est potentiellement sensible à des évolutions dans le cadre du changement climatique, comme par exemple les proliférations de brouteurs. Une étude spécifique à ce sujet devrait être menée.