Les indicateurs TDI (Trawl Disturbance Indicator ; Juan & Demestre 2012), mTDI (Foveau et al. 2017) et pTDI (Jac et al. 2020a) ont été développés pour évaluer l'état de santé des habitats sédimentaires du circalittoral du large au regard de la pression d’abrasion par les arts traînants (dragage, chalutage de fond).
Le chalutage de fond constitue la principale source de perturbation anthropique dans les environnements du large sur les plateaux continentaux européens (Robert et al. 2022).
Ces indicateurs sont basés sur l’analyse d’une matrice de traits biologiques responsables de la résistance et de la résilience de chaque organisme benthique à la pression d’abrasion. Les traits biologiques communs au calcul de tous ces indicateurs sont la mobilité, la fragilité, la position par rapport au substrat, la taille et le mode d’alimentation des espèces de mégaépifaune benthique.
Les unités d’habitats marins susceptibles d’être évaluées par l’indicateur sont, selon la Typologie NatHab Atlantique (v3, Michez et al. 2019 ; description de l’habitat dans La Rivière et al. 2022), les suivantes :
- D3-1 - Sables grossiers et graviers circalittoraux du large
- D4-1 - Sédiments hétérogènes circalittoraux du large
- D5-1 - Sables fins propres circalittoraux du large à dentales
- D5-2 - Sables fins envasés circalittoraux du large
- D6-1 - Vases et vases sableuses circalittorales du large
Les unités d’habitats marins susceptibles d’être évaluées par l’indicateur sont, selon la Typologie NatHab Méditerranée (v2, Michez et al. 2014 ; description de l’habitat dans La Rivière et al. 2021), les suivantes :
- IV.2.1 - Biocénose des fonds détritiques envasés (DE)
- IV.2.3 - Biocénose des fonds détritiques du large (DL)
L’indicateur peut également contribuer partiellement à l'évaluation des écosystèmes marins listés dans le Règlement relatif à la restauration de la nature (Annexe 2, UE 2024/1991) dans le Groupe de Types d’Habitat marin “7- Sédiments meubles (jusqu’à 1000 m de profondeur” (Soft sediments (not deeper than 1 000 metres of depth)).
- 2009 pour les campagnes IBTS (Mer du Nord) ;
- 2008 pour les campagnes CGFS (Manche) et les campagnes EVHOE (Golfe de Gascogne et Mers Celtiques) ;
- 2012 pour les campagnes MEDITS (Méditerranée occidentale) (Robert et al. 2022).
Acquisition des données : prélèvements de mégaépifaune lors des campagnes halieutiques pour le calcul du TDI
Les protocoles de récolte des données sont ceux issus des différentes campagnes halieutiques.
Le chalut de fond est déployé depuis un navire océanographique pendant une durée déterminée et à faible vitesse (3 à 4 nœuds). La durée varie selon la profondeur du prélèvement.
Les individus sont identifiés jusqu'à l'espèce ou à un niveau taxonomique plus élevé si l'identification est impossible ; ils sont également dénombrés et pesés. Les espèces commerciales (Homarus gammarus, Crangon crangon, Maja brachydactyla, Pecten maximus, Aequipecten opercularis, Palaemon serratus, Nephrops norvegicus, Buccinum undatum, Cancer pagurus, Aristaeomorpha foliacea, Aristeus antennatus, Parapeneus longisrostris, Bolinus brandaris) et les céphalopodes sont exclus du jeu de données car ciblés par les pêcheries.
Abondance ou biomasse
Les individus d'une même espèce sont dénombrés quand cela est possible sinon la biomasse est déterminée. Les données de biomasse sont standardisées en fonction de l'aire chalutée et exprimées en g.km-².
Score de sensibilité des espèces (SI)
Pour chaque espèce, un score de sensibilité (SI) est déterminé en fonction des traits biologiques. Cinq traits biologiques ont été retenus pour caractériser la réponse potentielle des organismes à l'abrasion physique (Tableau 1). Pour permettre de réaliser des analyses quantitatives, une valeur est attribuée à chaque modalité, variant d'une sensibilité faible (0) à une sensibilité élevée (3).
Tableau 1 : Traits biologiques de sensibilité à l'abrasion physique et scores associés (de Juan & Demestre 2012).
Les valeurs attribuées dans les cinq catégories sont additionnées pour chaque taxon (les taxa très vulnérables atteignent donc un score maximum de 15) et cette valeur a été considérée comme un indice de sensibilité de l’espèce (SI) spécifique aux perturbations induites par le chalutage (Foveau et al. 2017).
- Trawling Disturbance Impact : TDI (de Juan & Demestre 2012) :
L’indice TDI est basé sur l’utilisation du score de sensibilité des espèces (SI). Ainsi, les espèces sont réparties en cinq groupes suivant leur SI (Tableau 2).
Tableau 2 : Groupes de sensibilité au chalutage et gamme de score correspondante (Jac et al. 2020 ; d’après de Juan & Demestre 2012)
Le TDI est calculé avec l’abondance (ou la biomasse) de chacun des groupes (G1 à G5) par rapport à l’abondance (ou la biomasse totale) (Équation 1).
Equation 1 :
Avec :
- G1-G5 sont les abondances (ou la biomasse) de chaque groupe fonctionnel ;
- N l’abondance (ou la biomasse) totale de la station échantillonnée.
- TDI modifié : mTDI (Foveau et al. 2017) :
L'indice mTDI est également basé sur l’indice de sensibilité des espèces (Equation 2). Il varie entre 0 (pas d’espèces vulnérables) et 15 (seules des espèces très vulnérables sont présentes dans la zone).
Equation 2 :
Avec :
- Bi l’abondance (ou la biomasse) du taxon i ;
- Bn l’abondance (ou la biomasse) totale de la station échantillonnée ;
- SIi le score de vulnérabilité de l’espèce i.
- TDI partiel : pTDI (Jac et al. 2020a) :
Le TDI partiel (pTDI) a été développé dans le but de détecter de manière plus efficace l’effet du chalutage sur les communautés benthiques, en se concentrant uniquement sur les espèces sensibles (SI>7). Son calcul est basé sur celui du mTDI (Equation 3).
Equation 3 :
Avec :
- Bij l’abondance (ou biomasse) du ième taxon de la liste j des taxa sensibles ;
- SIij du ième taxon de la liste j des taxa sensibles ;
- Bn l’abondance (ou biomasse) totale de la station échantillonnée.
Le TDI est sensible aux pressions physiques d’abrasion d'origine anthropique (p. ex. dragage, chalutage) (de Juan & Demestre 2012 ; Jac et al. 2020).
Il peut être mis en œuvre depuis des campagnes annuelles déjà programmées et financée par la PCP, il offre donc un compromis coût/bénéfice intéressant (mutualisation des moyens à la mer).
Le protocole de terrain et de traitement des échantillons est lourd. Il impose le déploiement d'un navire équipé d’un chalut de fond. L’identification de la mégaépifaune nécessite une expertise taxonomique avancée.